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Archéologie et vieilles dentelles... de pierre

            Alors… tout a commencé avec l’exposition dont nous vous avions parlé en novembre dernier :  Faire parler les pierres où nous avons découvert cette petite merveille :

Cette capture d’écran, tout comme notre photo :

ne rend pas justice à la beauté de cette pièce. La qualité de la sculpture est soutenue par la couleur sur la pierre qui donne vie à cette œuvre.

La notice de ce fragment est la suivante : 

Tête de Christ aux yeux clos

(Mise au tombeau ?)

Vers 1230 

Calcaire lutécien polychromé

Découvert à la croisée du transept en 2022

Mis en état pour étude en 2024

Parmi les têtes retrouvées en 2022, celle dont les yeux sont clos est la seule qu'il soit possible d'attribuer pour l'heure au Christ. La présence du linceul tendu à sa droite ne permet pas de déterminer sa position exacte. En dépit de son état lacunaire, la sérénité de son expression, la sensibilité du modelé et l'émotion subtile qu'elle dégage en font un sommet de la sculpture de cette période.


            L’exposition est ouverte jusqu’au 16 mars ; si vous avez l’occasion d’aller admirer ce visage, ainsi que les autres pièces, ne vous privez pas de cette expérience.

            Vous serez peut-être intéressés par une courte présentation en vidéo :

            En plus de ce que vous pouvez voir au musée de Cluny, un documentaire d’Arte, Enquête sur les trésors enfouis de Notre-Dame de Paris, présente certaines des découvertes archéologiques faites dans le chœur de la cathédrale Notre-Dame après l’incendie :

 
 
Les progrès scientifiques dans toutes les branches de l'archéologie et de l'Histoire sous simplement époustouflants.

Curiosités de musée : Pause-Lapin au musée de Cluny

           On ne le remarque pas toujours quand on passe le contrôle des billets à l’entrée du musée de Cluny, mais il y a une adorable œuvre contemporaine à cet endroit – on remarque cette Pause-Lapin si on sort par l’escalier : 

 


 


            En 2018, à la suite de la modernisation du musée, cette œuvre fut ajoutée au musée. Elle est le résultat de la collaboration de deux artistes qui sont amis : Florence de Ponthaud-Neyrat et Pablo Reinoso.

Cette œuvre d’acier peint, bronze et tissu veut rappeler la chapelle qui a été récemment restaurée et qui est absolument splendide, mais elle est surtout une sorte d’hommage et d’inspiration moderne des trésors que sont les tapisseries de la Dame à la licorne (la licorne y est certes un personnage des plus importants, mais les conils tissés font aussi partie de l’histoire).

             Que vous l’admiriez avant d’aller au musée ou en en sortant, ne manquez pas cette petite merveille qui s’intègre magnifiquement au musée de Cluny.


Expositions (à venir) : Musée de Cluny

            Du 19 novembre 2024 au 16 mars 2025 (certes, vous avez le temps de planifier une éventuelle visite, mais nous préférons vous prévenir avant leurs ouvertures), le musée de Cluny va nous présenter deux expositions en lien avec la prochaine réouverture de la cathédrale Notre-Dame à Paris : « Faire parler les pierres. Sculptures médiévales de Notre-Dame » et « Feuilleter Notre-Dame. Chefs-d'œuvre de la bibliothèque médiévale ».

 


            Au sujet de « Faire parler les pierres », le site du musée nous dit :

« Le musée de Cluny conserve une partie importante du décor médiéval sculpté de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Celles-ci n'avaient pas fait l'objet d'une étude approfondie depuis le début des années 1980. L’exposition "Faire parler les pierres. Sculptures médiévales de Notre-Dame" promet de renouveler la connaissance sur ces collections, en révélant les résultats de l’important programme d’étude et de restauration mené depuis 2022.

Aux œuvres habituellement présentées dans la salle des sculptures de Notre-Dame s’ajoutent dans l'exposition des pièces encore jamais montrées au public. Une sélection de fragments permet d’évoquer les corps disparus des statues colossales de la galerie des rois. Un dossier consacré à la statue d’Adam, chef-d’œuvre de la sculpture gothique, déroule son parcours mouvementé jusqu’à nos jours.

La scénographie restitue la disposition des fragments restaurés du portail Sainte-Anne et des linteaux du portail du Jugement dernier. Les traces de polychromie retrouvées de ces œuvres sont également mises en valeur. 

Cet événement est l’occasion de dévoiler pour la première fois au public une trentaine de fragments du jubé des années 1230 mis au jour lors des recherches archéologiques préventives conduites par l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) depuis le printemps 2022.

Près de 120 œuvres jalonnent le parcours du visiteur à la rencontre du décor sculpté extérieur et intérieur de Notre-Dame avant les destructions de l’époque moderne. Afin de contextualiser ces œuvres, des prêts issus de grandes institutions comme le musée du Louvre ou le musée Carnavalet - Histoire de Paris, du dépôt lapidaire de la cathédrale et de collections privées viennent approfondir le sujet.

Cette exposition restitue les résultats d'un ambitieux programme d’étude et de restauration conduit depuis près de trois années en partenariat avec le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) et le Laboratoire de recherche des monuments historiques (LRMH).

L’exposition "Faire parler les pierres. Sculptures médiévales de Notre-Dame" est organisée par le musée de Cluny en partenariat exceptionnel avec l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives).

Elle bénéficie du label "Notre-Dame de Paris : vers la réouverture" coordonné par l'établissement public Rebâtir Notre-Dame, maître d'ouvrage du chantier de restauration. »

 


 

            Au sujet de « Feuilleter Notre-Dame », qui est une exposition en collaboration avec la BnF et les Archives nationales (entre autres), nous pouvons lire :

« L’histoire de Notre-Dame, ce n’est pas seulement celle de son célèbre édifice ; c’est aussi celle des livres, manuscrits et imprimés qui servaient au culte ou à l’étude.
Cette exposition offre un condensé de la richesse de la vie intellectuelle et artistique de la cathédrale au cours du Moyen Âge et de la multiplicité des centres d’intérêts de ses nombreux bienfaiteurs. Elle met également en valeur le rôle clé joué par le chapitre cathédral dans la gestion des livres et de la bibliothèque.

 

Le parcours rassemble une quarantaine de pièces, dont une trentaine de manuscrits médiévaux conservés au département des manuscrits et à la bibliothèque de l’Arsenal (BnF) et une dizaine de manuscrits, registres capitulaires et plan conservés dans d’autres institutions (Archives nationales, Archives historiques de l’archevêché). »

 

            Donc, comptez une heure pour chaque exposition, plus une ou deux dans le musée lui-même (en cas de coup de fatigue, il y a un adorable café au rez-de-chaussée avec de très jolies œuvres sur le musée). 

Bonne visite !

 

Exposition : Merveilleux Trésor d’Oignies : Éclats du XIIIe siècle au Musée de Cluny

            Jusqu’au 20 octobre 2024, vous pouvez aller visiter une petite – mais très riche – exposition sur le trésor d’Oignies.

            Le musée nous apprend qu’il « présente un trésor classé parmi les sept merveilles de Belgique, le trésor d’Oignies.

Ce dernier est associé à l’histoire du prieuré Saint-Nicolas d’Oignies, devenu célèbre grâce à la bienheureuse Marie d’Oignies, mystique encore vénérée aujourd’hui, et à Jacques de Vitry, brillant prédicateur et un temps évêque d’Acre en Terre Sainte, principal mécène du prieuré et pourvoyeur de reliques et de pierres précieuses.
Le prieuré fut au XIIIe siècle un important foyer de création d’objets d’orfèvrerie, sous l’égide d’Hugo de Walcourt, dit Hugo d’Oignies.

Parmi la cinquantaine d’objets du trésor, une trentaine pouvant voyager va être exposée au musée de Cluny : des pièces d’orfèvrerie (surtout des reliquaires) et quelques textiles. Ce prestigieux trésor sortira pour la première fois dans sa presque intégralité du territoire belge, cent ans après une présentation partielle de trois pièces au musée du Louvre en 1924.
L’exposition permettra de raconter l’histoire du prieuré d’Oignies et de ses protagonistes, et constituera un éclairage sur la production orfévrée d’Hugo d’ Oignies et de son atelier. »

            Il y a des très, très jolies pièces :

 


et vous pourriez peut-être profiter des Journées du patrimoine (samedi 21 et dimanche 22 septembre) afin d'aller admirer ces merveilles. 

Vous trouverez toutes les informations nécessaires sur le site du musée.

« À table ! » (version Moyen Âge - dans les classes supérieures)

Il y a quelques années – en 2008 pour être exact – la BBC nous donna un court documentaire : Clarissa and the King’s CookbookClarissa et le livre de cuisine du roi.

Clarissa, c’était Clarissa Dickson Wright (24 juin 194715 mars 2014), actrice, présentatrice et cuisinière extraordinaire. Elle reste, encore aujourd’hui, une référence et une cuisinière hautement respectée.

 Le livre de cuisine, c’est The Forme of Cury (littéralement La Méthode de cuisine – en ancien français « queuerie » voulait dire « art de cuisiner » d’où... « maître queux »), ouvrage de la fin du XIVe siècle qui contient cent quatre-vingt-seize recettes. Il s’agit d’un nombre impressionnant de recettes, mais, comme le dit Clarissa Dickson Wright et d’autres qui se sont penchés sur cet ouvrage, le chef aurait pu en ajouter quatre de plus, histoire de faire un compte rond.

Le manuscrit original, compilé par le principal chef cuisinier du roi, ne nous est pas parvenu, mais il nous reste neufs exemplaires et le texte en moyen anglais fut traduit par le vicaire (et passionné d’antiquités) Samuel Pegge (Chesterfield, 5 novembre 1704 – 14 février 1796) en 1780.

Bien évidemment, ce livre de recettes ne reflète que le régime alimentaire de la cour du roi – roi qui d’ailleurs dépensait souvent sans compter pour sa table. Viandes, poissons, légumes, fruits, ingrédients variés se trouvent parmi les recettes, mais surtout on y lit le nom d’épices du bout du monde qui apparaissent pour la première fois dans un manuscrit.

Le roi, c’était Richard II d’Angleterre (Bordeaux, 6 janvier 1367 – château de Pontefract, 14 février 1400), dont le court règne fut marqué de bien des tumultes.

 

Dans le documentaire, notre cuisinière géniale recrée trois recettes :

- sauce madame (une oie farcie de sauge, persil, hysope, sarriette, ail, grains de raisin, coings et poires – la farce devient la sauce lorsqu’on l’ajoute dans un pot à la graisse de l’oie récupérée dans le plat de cuisson, à des tranches de pain imbibées de vin et à de la poudre douce et que le tout est porté à ébullition et réduit afin de napper l’oie coupée en tranche qui doit alors être servie au plus vite)

- aigre-douce de poisson (des morceaux de divers poissons d’eau douce frits à l’huile d’olive et nappés d’un sirop de vinaigre de vin blanc au sucre, cannelle, gingembre, clous de girofle où ont baignés des oignons hachés, des raisins de Corinthe et des raisins de Smyrne, l’aigre-douce ayant été portée à ébullition et réduite afin de napper les morceaux de poissons frits)

- poires en confit (poires cuites dans du bon vin rouge avec des mûres et des mûres blanches ; une fois cuites, elles sont placées dans un plat et on ajoute au vin du miel et du gingembre en poudre afin de le réduire en sauce pour les poires).

 

Nous sommes récemment retournée au musée de Cluny (pour les expositions Les arts en France sous Charles VII et Merveilleux trésor d’Oignies : éclats du XIIIe siècle ; informations ici) et en admirant de nouveau les salles du musée que nous n’avions pas visitées depuis quelques années, nous avons croisé cette petite merveille :

 Vue générale de la cheminée

 Plan rapproché

 
Notice explicative
 

Cette cheminée n’est pas aussi énorme que celle d’un palais royal, mais elle donne une excellente idée de ce à quoi une cuisine de l’époque pouvait ressembler.

Parmi les recettes choisies par Clarissa Dickson Wright, c’est un élément de sauce madame qui est particulièrement intéressant : la poudre douce. Ce mélange d’épices rares et coûteuses est souvent employé dans The Forme of Cury, mais ce mélange est aussi mentionné dans d’autres recueils et écrits du Moyen Âge et se retrouve dans toute l’Europe. Par exemple, ce mélange est mentionné par le bourgeois qui rédigea Le Ménagier de Paris (vous trouverez le manuscrit ici et le texte imprimé ici), ce curieux – mais fascinant – « traité de morale et d’économie domestique composé vers 1393, contenant des préceptes moraux, quelques faits historiques, des instructions sur l’art de diriger une maison, des renseignements sur la consommation du Roi, des Princes et de la ville de Paris, à la fin du quatorzième siècle, des conseils sur le jardinage et sur le choix des chevaux; un traité de cuisine fort étendu, et un autre non moins complet sur la chasse à l’épervier ».

Tous les lecteurs d’aujourd’hui s’accordent à dire qu’une des difficultés des anciens recueils de recettes est qu’une partie des instructions « manque », tout simplement parce que ces ouvrages s’adressaient à des cuisiniers de profession et que certaines pratiques étaient pour eux évidentes[1] et c’est là que l’expérience de Clarissa Dickson Wright se révèle extrêmement importante si nous voulons recréer ce mélange d’épices car elle est la seule à mentionner le sel. En y réfléchissant, c’est logique, mais sans elle et sa remarque « Salt, of course! [Du sel, bien sûr !] » le mélange est incomplet. D’ailleurs, il est possible que sel et sucre aient été ajoutés en dernier à un mélange d’épices tout préparé puisque ce qui constitue la poudre douce (ou poudre de duc dans Le Ménagier de Paris) peut aussi servir afin de faire la poudre forte.

Pour la poudre douce, la plupart des recettes s’accordent sur l’utilisation du sucre, gingembre et cannelle en poudre – plus le sel qui n’est pas mentionné, mais doit être utilisé afin de faire ressortir le sucre. Certains ajoutent de la cardamome, des grains de poivre, du macis, des clous de girofles ou de la noix de muscade en poudre. Poivre et clous de girofle nous semblent trop violents pour la poudre douce.

Pour la poudre forte, il n’y a pas (ou très peu) de sucre. Gingembre, cannelle et sel restent une base et viennent s’y ajouter clous de girofle (là, oui !), macis, muscade (ces deux-là sont issus du même fruit, mais n’ont pas le même goût), maniguette, poivre noir et poivre long (ce dernier est moins fort, mais plus parfumé que le poivre usuel).

 

Nous proposerions donc :

Pour la poudre douce :

-         2 mesures de sucre (blanc ou roux – tout dépend du contenu des caisses de votre souverain de votre goût)

-         ½ mesure de sel

-         3 mesures de gingembre moulu

-         1 mesure de cannelle moulue

-         1 mesure de cardamome moulue

-         1 mesure de noix de muscade moulue

-         ½ mesure de macis moulu

Pour la poudre forte :

-         ½ mesure de sel

-         2 mesures de gingembre moulu

-         1 mesure de cannelle moulue

-         1 mesure de clous de girofle moulue

-         1 mesure de grains de poivre noir moulus (ou une variété de poivre plus rare)

-         1 mesure de poivre long moulu

-         1 mesure de maniguettes moulues

-         1 mesure de noix de muscade moulue

 

Maintenant… À vos fourneaux… Prêts… Cuisinez !


[1] : Nous avons récemment trouvé une recette où il était indiqué, au sujet d’un poireau, qu’il fallait d’abord couper l’extrémité où se trouvent les racines. Cette action, plus qu’évidente à qui fait de la cuisine, est une indication précieuse pour les novices. Les anciens recueils s'adressent à des professionnels qui savent comment opérer en cuisine.