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9 mars 1774

Les archives dont nous avons besoin afin de pouvoir achever notre travail sur l'ouvrage de Crauk étant fermées, nous avons commencé à rassembler des documents sur Constance Mayer La Martinière. 

Selon notre habitude, nous avons aussi consulté les archives, mais son acte de décès du 26 mai 1821 a brûlé et l'acte reconstitué (à en croire Gueullette) n'est pour l'instant pas accessible. Il nous faudra aussi localiser le procès verbal du commissaire qui a fait l'enquête après son suicide.

Pour ce qui est de son acte de baptême, nous avons eu bien des surprises : si la plupart des biographes s'accordent à dire qu'elle est née et a été baptisée le 9 mars, en revanche année et lieu de naissance ont posé quelques problèmes. Contrairement à ce que Gueullette pensait, elle n'était pas née à Paris (où son père était un bourgeois de Paris rattaché à la paroisse St-Sulpice), mais dans l'Aisne, à Chauny. Heureusement pour nous, les registres paroissiaux de cette commune existent encore. Comme la plupart des biographies donnent 1775 comme année de naissance, nous avons commencé par cette partie des registres - pour ne rien trouver. Certains auteurs donnent d'autres années de naissance : entre 1774 et 1778. C'est en 1774 (vue 123, en haut, à gauche) que se trouve l'enregistrement du baptême de Marie Françoise Constance La Martinière, fille légitime de Pierre La Martinière et Marie Françoise Lenoir... si ce n'est que ses parents se marièrent le 9 juin 1789. Bref, il est bien pratique de ne pas accoucher dans sa paroisse si l'on souhaite mentir à un prêtre.

Nous avons, certes, accès à cette information grâce aux archives en ligne, mais il reste décevant que nos prédécesseurs n'aient pas accordés plus d'importance à la vérification de leurs sources.

 

Nous sommes aussi allée voir la tombe de cette peintre au cimetière du Père-Lachaise (dans la 29ème division). Si nous n'avions pas su que la statue d'un petit chien se trouve au sommet de sa tombe, nous aurions eu un mal fou à la localiser (nous avons eu quelques difficultés à la localiser quand même). Ce monument est d'autant plus dur à trouver que le nom de notre pauvre artiste n'y est pas mentionné. Un imbécile ayant légèrement tracé le nom de Prud'hon sur l'une des faces du monument, nous nous sommes empressée de vérifier - une seconde fois - que cet homme n'était pas enterré avec elle et la tombe de Prud'hon se trouve effectivement à quelques mètres de là. Encore heureux que les bonnes mœurs de l'époque aient certainement empêché Prud'hon de se faire ensevelir avec son élève autrement il lui aurait  - encore - volé la vedette.

Maintenant, nous allons essayer de trouver à qui suggérer l'ajout d'une plaque commémorative sur le monument de Constance Mayer La Martinière ou, au minimum, l'entretien du monument (la mousse donne certes un charme gothique à l'ensemble, mais le petit chien en fonte est dans un bien triste état). Espérons que les Monuments historiques comprendront l'importance de protéger cette sépulture.

 

Mais quel Barizain ?

Si vous vous penchez sur la vie du peintre Xavier Sigalon (1787-1837)  - dont le travail est d'ailleurs très intéressant, vous lirez certainement qu'il fut notamment formé par « Barizain, dit Monrose » qui était un élève de David.

 

Fort bien.

 

Mais qui était ce Barizain dit Monrose ?

 

Curieusement, le Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs de Bénézit ne le mentionne pas. 

Une fiche sur le site de la Bibliothèque nationale mentionne un acteur, Jean François Eugène Barizain dit Monrose (Paris, 7 avril 1817 - Bruxelles, 1899) qui a rédigé un ouvrage sur la diction.

Son père, Claude Louis Séraphin Barizain dit Monrose (Besançon, 6 décembre 1783 - Paris, 20 avril 1843), et son frère aîné, Antoine Martial Louis Barizain, dit Louis Monrose (Turin, 10 juin 1811 - Paris, 7 juillet 1883), étaient également acteurs.

 

Les fils du célèbre acteur Monrose étaient trop jeunes pour avoir été élèves de David et avoir formé Sigalon, même si Eugène est parfois désigné comme étant le maître de Sigalon à Nîmes pendant deux ans.

 

Nous pensons que l'erreur provient - notamment - de la façon dont Barizain fut mentionné dans La Revue des deux mondes en 1934 : « A dix ans, la famille s'étant transportée à Nîmes, l'enfant consumait ses veilles en copiant des estampes à la bibliothèque, quand vint à passer dans le Midi un obscur élève de David, appelé Barizain, frère du comédien Monrose. »

 

De nombreuses sources s'accordent à dire que Sigalon a rencontré Barizain en 1805, mais trouver un Barizain dit Monrose qui aurait été adulte en 1805, aurait pu être un élève de David et aurait eu un acteur pour frère pose un réel problème - à moins que la date de cette rencontre ne soit fausse.

 

En fait, il est possible que des circonstances extraordinaires aient mis un Barizain sur le chemin de Sigalon. En effet, le père de Louis et Eugène avait un frère, Jean Auguste Désiré Barizain dit Monrose (Rouen, 23 germinal An V/12 avril 1797 - Ingouville, 3 décembre 1829). Jean est effectivement né à Rouen le 12 avril 1797. Il s'est marié à Nîmes le 17 janvier 1818 et est mort à Ingouville le 3 décembre 1829.

Sigalon avait dix ans quand Barizain est né, mais la présence de Jean Barizain à Nîmes semble faire pencher la balance du côté d'une possible rencontre. En revanche, 1805 semble étrange - très étrange.

 

Pourtant...

 

Dans la liste des élèves de David - et en particulier ceux qui se sont rebellés contre le maître et ont formé la "secte des Barbus" (aussi appelés les Primitifs, les Penseurs ou les Méditateurs), il y a effectivement un Barizain, surnommé « Monrose le Jeune », ce qui serait dans la tradition, puisque le père se prénommait Jean. La secte des barbus était guidée par Pierre-Maurice Quay (1777-1803) et le groupe finit par se séparer quelques années après sa mort. Ce Barizain était le plus jeune membre et grâce au travail de Delécluze, nous apprenons dans David, son école & son temps : souvenirs, publié en 1855, que le frère de l'acteur Claude Barizain dit Monrose, était aussi danseur au Théâtre des Jeunes Artistes (les plus vieux membres de cette troupe n'avaient que seize ou dix-sept ans au maximum).

 

Certains modèles dans les ateliers des artistes étaient des enfants de moins de dix ans. On peut imaginer que David ait accepté de former quelqu'un d'aussi jeune que Jean Barizain (peut-être avec l'idée de modeler ce jeune esprit).

 

La description de Delécluze (pp. 328-330) soulève quand même quelques problèmes :

Ordinairement, dans les écoles, les plus jeunes élèves se font un point d'honneur d'imiter les plus âgés, surtout dans leurs travers. C'est ce qui ne manqua pas d'arriver vers 1800-1801, lorsque la secte des primitifs eut pris tout son développement : Maurice eut parmi les jeunes dessinateurs un imitateur ou plutôt un singe, qui donna dans toutes les folies de la secte des penseurs.

Ce nouvel inspiré était Monrose, auquel s'étaient joints plusieurs autres élèves. Tandis que son frère aîné jouait la comédie au Théâtre-Français, dans l'emploi des grandes livrées, Monrose le jeune était attaché comme danseur au théâtre des Jeunes Artistes*, et il en était là quand des dispositions plus que douteuses lui firent prendre la résolution d'étudier la peinture chez David. Lorsqu'il entra dans cette école, il se ressentait encore des habitudes de sa première profession, et il lui arriva longtemps de faire plus de pirouettes que de dessins. Forcé d'être économe, mais mourant d'envie de se singulariser par son costume, à l'imitation des primitifs ses aînés, il laissa croître ses cheveux et sa barbe, espèce de travers qui se reproduit tous les dix ans chez les élèves en peinture, et se mit à prêcher de la morale et à commenter les poésies d'Ossian devant son petit auditoire. Les poèmes de ce barde étaient exclusivement le livre, la Bible de ces sous-sectaires, qui se recrutaient de tout ce que l'atelier de David avait de plus turbulent et de plus inepte parmi les rapins. Mais une aventure burlesque mit fin à ces niaiseries. Vers 1805, Monrose et sa troupe désirant s'échapper de Paris, que dans leurs discours boursouflés ils ne désignaient jamais autrement que comme une nouvelle Babylone, réceptacle de tous les vices, résolurent de fuir dans les forêts pour passer une journée à la manière des héros d'Ossian. Le chef de la bande, Monrose, muni d'une guitare dont il raclait tant bien que mal, conduisit ses adeptes au bois de Boulogne, où Dieu sait comme la journée se passa. Vers le soir, il leur vint l'idée, toujours dans le but de se conformer aux mœurs et usages des héros d'Ossian, de mettre le feu à un arbre ; mais les surveillants et les gendarmes, accourus à la vue de cet incendie menaçant, mirent la main sur le collet des jeunes bardes, que l'on conduisit à la préfecture de police, où on leur enjoignit de se faire raser et de s'habiller comme tout le monde. Telle fut la fin des derniers rejetons de la secte des penseurs ou primitifs, dont les principaux chefs étaient morts à cette époque, ou au moins rentrés dans la vie commune, et complètement désabusés.

 

 * : Ce théâtre était situé dans la rue Basse, à l'encoignure de la rue de Lancri. C'étaient des enfants, dont les plus âgés avaient seize à dix-sept ans, qui y jouaient, et c'est là qu'ont débuté les deux Monrose dont il est question ici.

 

Si c'est bien le Jean Barizain dit Monrose qui est né en 1797 qui a été formé par David, nous avons un problème de dates - et de barbe - à moins que le petit Jean n'ait été aussi un phénomène de foire à huit ans.

 

En 1844, Auguste Pelet publia le Catalogue du musée de Nîmes, précédé de la notice historique de la Maison-Carrée et de la biographie de Sigalon où il nous apprend à la page 18 que Monrose, « élève médiocre de David », vint s’installer à Nîmes alors que Sigalon avait vingt ans – donc en 1807 (alors que Jean avait dix ans ?!). Cependant, Sigalon ne monta à Paris qu’en 1816.

 

Il est vrai que la plupart des sources semblent quand même pointer vers Jean Barizain dit Monrose, mais le plus grand problème reste la date de 1805.

Puisque Sigalon résidait à Nîmes, qu'il a rejoint l'atelier de Guérin (1774-1833) en 1816 et que Barizain pouvait se trouver dans la région avant la date de 1818, si Barizain forma effectivement Sigalon à la peinture pendant deux ans, 1814 semble une date plus plausible.

Il est également possible que la durée de la formation soit fausse et que le « 1805 » doive être lu « 1815 ». Barizain aurait eu alors dix-huit ans et puisqu'il ne devait pas être un Mozart de la peinture et du dessin - autrement nous aurions plus d'informations biographiques à son sujet, cette date semble plus compatible avec sa mission de formateur.

 

Si c'est bien le Jean Barizain dit Monrose né en 1797 qui a aidé Sigalon et si la date de 1805 est exacte pour leur rencontre, il faudrait écrire la biographie de cet artiste et donner au monde un tableau plus complet que celui de Delécluze sur Jean (et sur toute la famille Barizain dit Monrose). Si personne ne se dévoue, nous y songerons peut-être, mais seulement lorsque nous aurons fini notre travail sur Constance Mayer.

 

Soit les dates sont fausses, soit Jean Barizain dit Monrose mérite une biographie, soit... il nous manque un frère Barizain dit Monrose entre Claude et Jean, mais nous n'avons rien trouvé en généalogie à ce sujet. Le prénom et de la réelle identité du Barizain dit Monrose qui a aidé Sigalon reste légèrement mystérieuse.

 

 

Post-scriptum généalogique: en recherchant les actes de cette famille, les hommes de la famille sont enregistrés comme Barizain dit Monrose, alors que certains ouvrages écrivent leur nom Barizain, dit Monrose, comme s'il s'agissait d'un surnom que la famille d'acteurs se serait donné et aurait conservé (Louis Monrose a même fait de Monrose son seul nom de scène). Le manque de virgule à l'état civil et l'enregistrement officiel du nom Barizain dit Monrose peut aussi indiquer un point géographique, un surnom militaire ou encore une adoption à l'âge adulte par une famille Monrose.

 

Même le patronyme est intéressant, mais quel Barizain !


Le mystère Jamar ou comment passer deux semaines à chercher les dates de naissance et de mort d'un peintre

Louis Alexis Jamar est un peintre mystérieux. Nous savons qu'il a travaillé et habité avec Géricault et qu'il a participé au Salon de Paris (jusqu'en 1850), mais il resta très secret.

Quand on l’interrogeait sur son maître et ami, il ne révélait que très peu de choses.

En général, il est mentionné uniquement pour son association avec Géricault et pour avoir peint un portrait de son maître.

De références en références, nous avons finalement trouvé deux dates : 1800-1875. Si une dizaine de pages citent ces dates lorsque Jamar est mentionné, aucune ne donne de justifications ou preuves.

Dans quelques ouvrages en anglais, Jamar est présenté comme un jeune peintre belge (les sites de généalogie semblent confirmer l'origine belge de ce patronyme). Ce fut finalement une brève citation tronquée qui nous mit sur la piste de la naissance de Jamar et il se trouve qu'il est né à Amsterdam où il a été baptisé le 12 juin 1800 dans la paroisse catholique de De Krijtberg. "Ludovicus Alexie" (Louis Alexis) était le fils de "Ludovicus Joseph Jamar" (Louis Joseph) et de "Maria Wilhelmina Volkin" (Marie Wilhelmine Volkin) ; son parrain était Joseph Lamaii et sa marraine était Alexandrine Du Lim.

Cependant, trouver un Louis Alexis Jamar ne signifiait pas qu'il s'agissait de la bonne personne et il fallait trouver un acte de décès.

Puisque la piste pour 1800 s'était avérée exacte, nous avons considéré que 1875 était peut-être la bonne année. Nous avons  vérifié les tables décennales de Paris et il n'est pas mort dans cette ville. 

Une brève mention sur internet nous a mis sur la piste du Val d'Oise et nous avons vérifié les tables décennales de toutes les communes et ce fut en arrivant sur la commune de L'Isle-Adam que nous avons enfin trouvé l'acte de décès de Jamar. Il est mort chez lui (41, rue Grande) à sept heures du matin le 12 septembre 1875. L'officier d'état civil donne une date de naissance erronée (le 16 juin 1800), mais la naissance à Amsterdam est confirmée, ainsi que le nom de son père (Louis Jamar). L'identité de sa pauvre mère n'était pas connue des deux témoins qui ont fait la déclaration. 

Il est en revanche intéressant d'apprendre que ses parents étaient français. Dans une biographie de Géricault, le fait que le père de Jamar était marchand de tableau est  mentionné. Peut-être les Jamar résidaient-ils dans le royaume de Hollande pour des raisons professionnelles au moment de la naissance de Louis Alexis ?

Édouard Dubufe - peintre

Le peintre d'histoire Édouard Dubufe n'est pas directement cité par Gustave Crauk dans son ouvrage Soixante ans dans les ateliers des artistes - Charles Dubosc, modèle, ce qui est assez curieux si l'on considère l'incroyable liste de noms célèbres mentionnés dans ce livre, mais il figurera dans notre étude critique grâce à une note de bas de page (il se trouve qu'une de ses œuvres est un indice qui devrait nous aider à résoudre un mystère au sujet d'une statue citée par Crauk).

Lorsque nous citons une personne dans nos notes, nous citons dates (et lieux) de naissance et de mort et nous ajoutons une courte biographie de cette personne.

Le sort des modèles des artistes en Histoire est terrible, car, lorsque leur prénom (ou surnom) nous est parvenu, il s'agit d'un exception et les informations biographiques relèvent du quasi miracle. Nous pourrions penser que le sort des artistes ou personnages célèbres serait plus enviable, mais il n'en est rien et les informations sur certaines femmes peuvent être très dures à trouver.

En cherchant les dates de Dubufe (d'ailleurs... un seul f suffit pour son patronyme ; il semble que son nom soit parfois défiguré par erreur), nous avons consulté le tome 2 du Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs d'Emmanuel Bénézit et d'autres sources sur Internet. Certains donnent 1819 comme année de naissance pour Dubufe ; d'autres disent qu'il est né en 1820. Pour certains il est mort à Paris, mais pour d'autres, il a quitté ce monde à Versailles.

Nous nous sommes donc tournée vers les archives. Afin d'éviter à avoir à consulter les tables décennales de tous les arrondissements de Paris, nous avons tenté notre chance à Versailles où les tables ont confirmé que Dubufe est effectivement mort dans cette ville.

Si vous avez besoin de données biographiques sur lui, voici ce que nous avons trouvé à la page 139 des actes de décès à Versailles en 1883 :

- Louis Édouard Dubufe est né à Paris (dans l'ancien huitième arrondissement) le 31 mars 1819.

- Ses parents étaient Claude Marie Dubufe et Edmée Françoise Dumesnillet.

- Il avait perdu sa première femme, Juliette Zimmermann.

- Sa seconde épouse, Marie Catherine Léonie Berthod, avait cinquante-trois ans selon l'acte de décès.

- Le couple résidait à Versailles au 22, boulevard du Roi.

- Dubufe était officier de la légion d'honneur.

- Les témoins étaient : Marie Édouard Guillaume Dubufe (fils du défunt, peintre d'histoire, âgé de trente ans, résidant à Paris au 43, avenue de Villiers) et Jean-Baptiste Métenier (beau-frère du défunt, entrepreneur en dorures, âgé de cinquante-trois ans, demeurant à Paris au 10, rue de Laborde).

- Dubufe est mort chez lui le vendredi 10 août 1883 à 17 h. Le décès (acte 801) fut enregistré le lendemain par l'adjoint au maire, Victor Bart.