L'histoire de la Villa Minerve ou de l'importance de consulter les hypothèques

           À Nice, au coin de la rue des Boers et de la rue du Soleil, se trouve une ancienne villa qui fut pendant quelques années la propriété de Georges et Adèle Doublet : la Villa Minerve.

Photo de la villa le 21 juin 2024

            Au sujet de cette villa, dans Demeures d’azur : Nice de Didier Gayraud (publié à Breil-sur-Roya par Les Éditions du Cabri en 1998 et dont un extrait est téléchargeable en PDF ici), vous pourrez lire : « C’est en 1897 que Georges Doublet, professeur de rhétorique au lycée de Nice, fit bâtir dans le quartier de Saint Barthélémy une villa qu’il baptisa Minerve.

            Grand érudit, agrégé de lettres et historien, il passa une partie de sa vie à effectuer des fouilles en Grèce, en Crète, en Tunisie et en Algérie. Dans ce pays, il participa à la création des musées archéologiques d’Alger et de Constantine avant d’être nommé, de 1890 à 1892, chef du service beylical des antiquités et des arts.

            De retour à Nice en 1897, Georges Doublet, très marqué par ses séjours en Afrique du Nord et par la civilisation arabe, choisit de faire édifier sa villa dans un style fortement inspiré du mauresque. Passionné d’histoire locale, ce normalien fut l’auteur de plusieurs ouvrages dont une « Histoire des Alpes-Maritimes » et écrivit de nombreux articles sur la ville de Foix où il enseigna durant trois ans. Il collabora également à diverses revues régionales telles que « Nice historique », « Le bulletin de la société des lettres et des arts des Alpes-Maritimes », « L’aloès », « L’Éclaireur de Nice »...

            Georges Doublet habita la demeure jusqu’à la fin des années 1920, date a laquelle il la vendit à Monsieur Prévost. Il s’installa alors non loin de là à la villa Brin de Rêve (aujourd’hui disparue) où il termina sa vie en 1936.

            Désormais encadrée d’immeubles, la villa Minerve a toutefois conservé son aspect originel. »

 

            De même, à la page 283 de son article « Georges Doublet (Versailles 1863 – Nice 1936) » (publié dans la revue Provence historique en 2018, Luc Thevenon écrit : « Son originalité, liée au souvenir nostalgique du Maghreb, lui fit choisir, pour la villa qu’il fait construire à Nice dès 1898, un style mauresque de fantaisie. La villa « Minerve », nom qui n’est pas choisi au hasard, est conservée rue du Soleil (fig. 6). Il la vend fin 1920 à un certain Prévost. Mais il reste aux environs immédiats en emménageant dans une villa au n)1 rue des Boers. Puis en 1930 il s’éloigne à peine, restant dans le quartier Saint-Barthélemy en s’installant dans la ville « Brin de Rêve » avenue Stephen Liégeard. Contrairement aux précédents, cet édifice a été détruit ! »

 

            Alors… Non. Non, non, et non.

            Aujourd’hui, l’état civil de nos protagonistes et les hypothèques sont consultables en ligne, ce qui est un avantage, mais ces documents ont toujours été disponibles, en mairies et aux Archives départementales des Alpes-Maritimes.

            Voici la véritable histoire de la villa « Minerve » : Georges Doublet (1863-1936) dû espérer très vite qu’il ferait le reste de sa carrière à Nice après avoir eu son premier poste d’enseignant à Foix, car il acheta une propriété dans le quartier de Saint-Barthélemy à Nice où se trouvait la « Villa Marius », villa d’inspiration mauresque pour le style et qui avait été édifiée par M. Palmero en 1887. Doublet la renomma-t-il « Villa Minerve » pour des raisons pratique en conservant le « M » initial ? c’est une possibilité, puisqu’il était plutôt helléniste que latiniste, mais nous n’avons pas réussi à déterminer si la lettre « M » décore de quelque façon cette villa.

Cette demeure se trouvait à près de trois kilomètres du lycée où Doublet enseignait, mais il y avait à l’époque très peu de constructions dans le quartier (au départ, la villa fut une construction isolée et la future rue des Boers n’avait pas encore de nom à ce moment-là). Il y avait un jardin devant et un derrière et la villa était élevée sur cave et rez-de-chaussée ; le terrain était clos de murs et avait une superficie totale d’environ 930 m².

Les propriétaires étaient : Hippolyte Aubry de la Noé, Louis Ravan et Louis Mayan (en 1882), les Palmero et les Curnier (en 1890). La propriété faisait partie d’un plus grand terrain et la vente se fit en deux temps.

Le terrain avait été initialement acheté au début du XIXe siècle par Louis Milon de Veraillon, son fils, Frédéric, en avait hérité, puis ses quatre enfants (trois fils et une fille), ce qui avait fait passer le terrain dans la famille Aubry de la Noé.

Le contre-amiral Charles Aubry de la Noé  et  son  épouse,  Mme  Héloïse  Marie  Guynot  de  Boismenu, qui  résidaient  au  9,  rue  Sainte-Honorine  à  Cherbourg  vendirent 811,5 m² aux Doublet pour 16 230 francs.

La villa fut vendue avec ses meubles par le  propriétaire du casino de Boulogne,  M. Marius Louis Curnier (d’où le nom initial de la villa), et son épouse Mme Jeanne Bathilde Cazaux, qui habitaient au 51, rue d’Amsterdam à Paris, 22 000 francs ; les meubles furent vendus pour 8 000.

Donc, pour 46 230 francs, les Doublet devinrent Niçois le 17 février 1896.

 

Les Doublet  résidèrent Villa Minerve jusqu’en 1930 (donc, ni « la fin des années 1920 » (Gayraud), ni « fin 1920 » (Thevenon).

Le 19 janvier, ils achetèrent la « Villa Brin de rêve » et son jardin  pour 85 000 francs à  Mlle Rosset[1]. Ils en eurent la jouissance rétroactive à partir du 1er décembre 1929 (certes, les Doublet étaient dans les murs en 1929, mais l’acte de propriété date de 1930 lors de la signature de l’acte authentique).

La superficie du jardin était d’environ 225 m². La propriété avait au nord, l’avenue Stephen Liegeard, Castellane à l’est, le chemin de l’église au sud et un mur mitoyen avec Mlle Belhomme à l’ouest. Des agrandissements étaient possibles seulement au nord et au sud et les arbres ne devaient pas mesurer plus de quatre mètres.

            Le 12 mars, les Doublet vendirent la Villa Minerve et son jardin, c’est-à-dire presque 800 m² en tout à M. Prévost[2].

La vente fut conclue pour 250 000 francs ; les Doublet reçurent 148 966,63 francs et 101 033,37 francs restants furent versés par Prévost en  échéances au Crédit Foncier de France, au 19, rue des Capucines à Paris, en  remboursement d’un prêt des Doublet pour 98 972 francs contracté le 28 août 1929 ; les Doublet n’avaient plus à être en communication sur ce sujet avec le Crédit Foncier.

Cette année-là, Prévost fit une demande pour construire un garage Villa Minerve et modifier la villa sur l’angle de la rue du Soleil et de la rue des Boers et Doublet déposa une demande pour construire une annexe avenue Stephen Liegeard.

 


Une carte postale ancienne se trouve en ligne et ce qui est intéressant est qu’elle porte le nom de Louis Prévost.

 

            L’histoire de la Villa Minerve nous démontre une fois de plus l’importance de remonter aux sources et que généalogie et hypothèques peuvent contenir des trésors d’information.



[1] : Marguerite Flavie Rosset (Nice, 21 février 1900 – 21 août 1969) au moment de la vente était « célibataire majeure, sans profession » ; elle résidait avenue Stephen Liegeard à la « Villa La Madelon ». Elle épousa Victor Casteu (1902-1970) le 9 avril 1942 à Nice.

[2] : Louis Prévost était né le 2 novembre 1867 à Vatan. Il était déjà propriétaire au 15, rue du Soleil.

Ingres, ce talentueux violoniste

            « Avoir un violon d’Ingres » est une charmante expression idiomatique… qui a le don de nous agacer au plus haut point parce que, la plupart du temps, nombreux sont ceux qui pensent qu’un « violon d’Ingres » est une activité pratiquée avec passion, mais sans sérieux.

Ce qui nous chiffonne, c’est que Jean-Auguste Dominique Ingres (Montauban, 29 août 1780 – Paris, 14 janvier 1867) aimait profondément la musique et qu’il finança ses premiers cours de peinture en étant rémunéré, de treize à seize ans, comme second violon à l’Orchestre du Capitole de Toulouse. Certes, il n’était sans doute pas second violon à Paris, mais il devait être assez extraordinaire afin de garder cette charge et donc ceux qui perpétuent l’idée que ses dons musicaux étaient assez ordinaires nous semble grandement injustes envers lui.

            Second prix de Rome en 1800, il obtint le premier prix l’année suivante, mais il ne put se rendre à Rome qu’en 1806 (quand les politiques sont en ébullition, les arts pâtissent souvent). Il résida en Italie – à Rome, puis à Florence – jusqu’en 1824 et retourna à Rome de 1835 à 1841 afin d’y diriger l’Académie de France.

Il connut le succès dès son retour en 1824, mais critiques et collègues ne furent pas toujours tendres à son égard en musique, mais aussi en peinture. Il fut cependant l’un des peintres pilier du néo-classicisme et des génies de la musique appréciaient ses talents musicaux (pour ne citer qu’eux, Franz Liszt (1811-1886) chantait les louanges du peintre-violoniste avec qui il avait joué à Rome lorsqu’Ingres dirigeait la Villa Médicis et Luigi Cherubini (1760-1842) composa pour lui O salutate Ingres).

            Donc, Ingres était un bon musicien. D’où vient alors cette expression idiomatique qui nous énerve tant ? Nous n’étions pas dans les salons de l’époque, mais l’écrivain Émile Bergerat (1845-1923) écrivit dans ses Souvenirs d’un enfant de Paris (mémoires en trois tomes de 1911 à 1913) qu’il était à l’origine de cette expression – après la mort d’Ingres. Dans le premier volume, publié en 1911, en parlant de son beau-père, Théophile Gautier (1811-1872), qui avait rêvé devenir peintre (ce qui explique qu’il fut parfois critique d’art), Bergerat écrivit :

            « Toute la joie du « home » chantait dans le salon qui n’était guère, d’ailleurs, qu’une chambre à peintures. C’était là qu’il était heureux. Comme je vous l’ai déjà dit, Théophile Gautier ne s’est jamais consolé de ne pas avoir été peintre. Comme il disait : « On ne naît pas toujours dans sa patrie », il professait encore « que personne n’exerce le métier ni l’art pour lequel la nature l’a formé ».

            – Tiens, faisait-il plaisamment, Victor Hugo, eh bien ! c’était un architecte. Il était spécialement créé pour édifier des cathédrales. Du reste, c’est ce qu’il a fait, en somme.
            Sur cette déviation des dons innés, à laquelle j’ai, le premier, appliqué la synecdoche de : « Violon d’Ingres », je n’étais pas d’accord avec mon maître, au moins pour ce qui le concernait. »[1]

            Il est certain que l’expression « violon d’Ingres » se répandit dans les salons à la fin du XIXe siècle et dans le reste de la population au début du siècle suivant, mais Gautier étant mort, Bergerat pouvait se dire auteur de l’expression.

            « Avoir un violon d’Ingres » garde un côté péjoratif (cette discrète critique qui nous pose problème). Dès son apparition, la veuve d’Ingres tenta de protéger la mémoire de son défunt époux ; la seconde Mme Ingres, Delphine Ramel (Paris, 26 décembre 1808 – 11 mai 1887), qui était la nièce d’un des mécènes d’Ingres, Charles Marcotte d’Argenteuil (1773-1864) dénonça l’expression dans les colonnes du journal Le Figaro le 30 juillet 1885 (n° 211) :

            « Monsieur le rédacteur,

            Depuis longtemps je désire rectifier une assertion qui se propage dans les journaux et dans les mémoires artistiques à propos des prétentions que M. Ingres montrait pour son violon, beaucoup plus, dit-on, que pour son pinceau.

            Il est sûr qu’il était très bon musicien et qu’il adorait Mozart, Gluck, Beethoven. Mais jamais il n’a eu la prétention de se poser en virtuose, interprétant simplement la deuxième partie de violon dans les admirables quatuors de ces maîtres.

            Cette rectification me paraît nécessaire pour ne laisser passer à la postérité un dit-on qui a tout l’air d’un ridicule.

            Je vous serais très obligée, Monsieur, d’insérer cette petite note dans Le Figaro, qui par sa publicité, rectifiera, j’espère une opinion répandue bien à tort.

            Recevez d’avance, monsieur, tous mes remerciements, ainsi que l’assurance de ma parfaite considération.

            Veuve Ingres »

 

            Malheureusement, ces messieurs continuèrent à utiliser ce bon mot (injuste et inexact).

 

            Tentons une mise à jour :

Avoir un violon d’Ingres : [expression idiomatique] pratiquer une activité avec passion et avec assez de talent pour pouvoir éventuellement en faire une activité professionnelle.

 

Espérons que Delphine Ingres, née Ramel, aimerait mieux cette définition.

 

Dessin de Mlle Ramel en 1844, future Mme Ingres (en 1852)

 



[1] : Bergerat (Émile), Souvenirs d'un enfant de Paris. [Volume 1], Paris, E. Fasquelle, 1911, p. 326.

Exposition : La collection Torlonia au Louvre

            Si vous aimez la sculpture antique et n’avez pas la possibilité de vous rendre à Rome, essayez de passer au Louvre où, du 26 juin au 11 novembre 2024, sont présentés les chefs-d’œuvre de la collection Torlonia.

            Le site de la Fondazione Torlonia nous apprend que la réunion des diverses pièces gréco-romaines de la collection commença dès 1800 (la famille Torlonia, d’origine auvergnate, se lança dans la banque, à Rome, et travailla avec le Vatican et ce fut le pape Pie VI (1717-1799) qui anoblit la famille à la fin du XVIIIe siècle). Les pièces de la collection furent soient achetées, soit trouvées lors de fouilles.

            Par exemple, vous pourrez y croisez notre vieil ami l’empereur Hadrien (76-138) :

 


             Certes, vous n’aurez pas le charme romain de la Fondation (qui se visite gratuitement, mais uniquement sur demande, le formulaire pouvant être téléchargé sur le site – et un don à la fondation pourrait faire apparaître votre formulaire plus près du dessus de la pile de demandes[1]), mais vous pourrez admirer les appartements d’Anne d’Autriche (1601-1666) qui ont été restaurés pendant vingt mois et qui servent d’écrin aux marbres antiques prêtés par la Fondazione Torlonia. 

D’ailleurs, si vous n’avez pas rendez-vous avec la dame Touy, l’Aphrodite de Mélos ou Le Rêve du bonheur de Mayer La Martinière, nous vous conseillons de passer de l’autre côté du Louvre afin de visiter les appartements de Napoléon III (aile Richelieu, salles 539 à 549) qui ont été entièrement rénovés et qui sont de nouveau ouverts au public depuis juin 2024.



[1] : La philosophie du Vatican les inspire peut-être.

 

Écouen - sa forêt, son château, son musée

            Nous nous souvenons d’une visite au Louvre et d’une visite au château de Vincennes alors que nous étions à l’école primaire.

            Il y eut aussi une visite de Versailles (toujours en primaire) qui aurait dû avoir lieu pour notre classe, mais qui fut accordée à une autre.

            Nous nous souvenons de pièces de théâtre et de films au collège et au lycée (nos années de prépa nous envoyèrent vers des destinations plus… exotiques).

            Dans toute notre scolarité, alors que nous étions en classe à Paris, il ne fut jamais question d’aller visiter le musée national de la Renaissance, mais il est vrai que la logistique est infernale si vous voulez visiter un musée avec une classe – et si vous ajoutez un car scolaire afin de transporter les élèves, l’enfer se fait beaucoup plus chaud.

            Il est dommage que nos enseignants n’aient pas eu la possibilité de nous emmener à Écouen, car le musée et son domaine sont absolument splendides.

 

            Nous avions planifié notre visite un lundi et nous avons eu la chance qu’il n’y ait pas trop de visiteurs ce jour-là, ce qui fait que nous avons pu prendre en photo d’incroyables perspectives.

Mais parlons déjà du trajet jusqu’à Écouen.

La page d’information du musée est très bien faite ; nous n’avons pas testé l’itinéraire recommandé pour les voitures, mais le parcours « transilien » indiqué était parfait : il suffit d’emprunter la ligne H au départ de la gare du Nord (voie 30 ou 31) et 25 minutes plus tard, on arrive à la gare d’Écouen-Ézanville.

Là, vous pouvez prendre un bus qui vous dépose tout près du château, mais pourquoi voudriez-vous vous priver d’un « bain » de forêt ? Certes, le chemin monte, mais quel bonheur de verdure !

Toujours sur la page d’information du musée, vous avez un petit plan afin de traverser la forêt jusqu’au domaine – c’est vraiment un très petit plan, mais il aide bien. En revanche, au premier embranchement, alors qu’un panneau vous indique la direction du musée sur la gauche, nous vous recommandons de prendre à droite :

            Quand vous arrivez au carrefour, prenez la route du Luat. Respirez, écoutez les oiseaux et admirez le paysage (ça donne envie de revenir avec un pique-nique et un bon gros livre) :


            Tout en haut d’une petite côte, vous arriverez à une des grilles du domaine. Si elle est fermée, suivez le mur sur la gauche et vous arriverez à une porte qui, elle, sera ouverte. Allez tout droit et rattrapez l’allée principale (qui monte encore, ce qui est logique puisque ce château fut bâti sur une colline et qui était tout à fait normal et logique pour l’époque).

Là vous arriverez au château qui abrite le musée :


            Si votre curiosité l’emporte et que vous allez sur la gauche, vous pourrez admirer la façade principale :


            Cependant, il vous faudra revenir sur vos pas et aller sur la droite afin d’arriver à l’entrée du musée (les très anciennes fenêtres sont en train d’être remplacées et il y a des travaux sur certaines façades ; d’un côté, il faut bien viser pour prendre des photos sans les échafaudages, mais le tarif réduit est appliqué à tous les visiteurs en ce moment) :


            Les terres où s’élève le château actuel appartenaient à la famille Bouchard de Montmorency et l’excellente situation géographique fait qu’une forteresse médiévale y avait été bâtie depuis quatre siècles quand Anne de Montmorency la fit détruire afin de faire construire un château digne de son rang et digne de la Renaissance.

Anne de Montmorency (Chantilly, 15 mars 1493 – Paris, 12 novembre 1567) était un homme extraordinaire. Sa famille était proche de la famille royale ; d’ailleurs, même si « Anne » peut être un prénom masculin, de Montmorency fut nommé Anne en l’honneur de sa marraine, la reine Anne de Bretagne (Nantes, 26 janvier 1477 – Blois, 9 janvier 1514), qui fut l’épouse de Charles VIII (1470-1498) et de Louis XII (1462-1515).

La proximité avec la famille royale fit que Montmorency fut élevé avec le futur François Ier (1494-1547) et en 1527, il épousa une cousine du roi, Madeleine de Savoie (1510-1586), avec qui il eut douze enfants (il eut aussi une fille illégitime).

Montmorency avait hérité de nombreuses terres et possessions et il fit fructifier son héritage. Son talent au service des rois de France fit qu’il augmenta le nombre de fiefs en sa possession (Écouen et Chantilly semblent avoir eu une place particulière dans ses attentions). En 1526, il fut Grand Maître de France (c’est-à-dire qu’il était chef de la Maison du roi). François le nomma Connétable (c’est-à-dire chef des armées) en 1538. En 1551, Henri II (1519-1559), qui était fort attaché à Montmorency, éleva la baronnie de Montmorency en duché-pairie.

Ce fut au service de Charles IX (1550-1574) que Montmorency mourut, après avoir été mortellement blessé lors de la bataille de Saint-Denis le 10 novembre 1567.

Le château d’Écouen resta dans la famille de Montmorency jusqu’en 1696 : Henri II de Montmorency (1595-1632) fut décapité sur ordre de Richelieu (1585-1642), qui en profita afin de saisir le château, mais il fut éventuellement rendu à la demi-sœur d’Henri, Charlotte de Montmorency (1571-1636). Cette dernière était l’épouse de Charles d’Angoulême (1573-1650) et leur fils aîné, Louis-Emmanuel d’Angoulême (1596-1653), eut une fille, Marie-Françoise (1631-1696), duchesse d’Angoulême et duchesse de Joyeuse par son mariage avec Louis de Lorraine (1622-1654) qui le légua à la famille des Condé (ces derniers possédaient déjà Chantilly).

Pendant la Révolution, le château fut utilisé comme prison militaire et comme hôpital.

Ce fut Napoléon (1769-1821), en 1805, qui transforma le château en institution pour les filles de la Légion d’honneur. Le site du musée nous apprend qu’en « octobre 1807, après la reconstruction d'une aile orientale, la rentrée des élèves se fait sous la direction de l'intendante Madame Campan à laquelle Napoléon avait dit : " Faites-en de bonnes mères de famille catholique, je ne veux pas de bas-bleus ". » Toujours aussi charmant cet empereur.

Louis XVIII (1755-1824) rendit le château aux Condé, qui n’en firent pas grand-chose, et en 1850, un autre Bonaparte, Louis-Napoléon (1808-1873), y installa la Maison de la Légion d’honneur, où des générations de jeunes filles furent instruites jusqu’en 1962. À  partir de cette année-là, le château fut transformé en musée.

            Il fallut de longs travaux afin que le musée national de la Renaissance ouvre ses portes en 1977.

Les Condé avaient abattu l’aile d’entrée et les vitraux de la galerie de Psyché se trouvent aujourd’hui au château de Chantilly certains pavements ont aussi été déplacés.

Les meubles, emportés à la Révolution, se trouvent en grande partie dans d’autres musées et au château de Chantilly.

L’Esclave rebelle et l’Esclave mourant de Michel-Ange (1475-1564) qui étaient dans des niches de l’aile d’entrée du château (celle qui fut détruite par les Condé), sont maintenant au Louvre. Henri II les offrit à Richelieu peu de temps avant que ce dernier ne le fit exécuter ; après avoir voyagé de résidence en résidence, ces statues entrèrent au Louvre à la Révolution

Certaines collections présentées proviennent de dons et certaines œuvres étaient conservées au musée de Cluny, qui n’avait pas assez de place afin de les exposer.

Le musée d’Écouen est le seul uniquement consacré à la renaissance.







            Le site en lui-même est une merveille, mais ce qui surprend, parce que les séries et les films nous conditionnent à croire que Moyen-Âge et Renaissance étaient ternes, c’est la couleur.

Aujourd’hui, certaines salles ont perdu certaines de leurs couleurs, mais, à l’origine, il y avait de la couleur du sol au plafond. Littéralement. L’effet produit est magnifique… magique… presque irréel. Pourtant, les sols déplacés d’une salle à l’autre et quelques cheminées dont le décor peint n’est plus complet nous rappellent que lorsque le château était habité par Anne de Montmorency l’éventail de couleurs était encore plus grand et prestigieux qu’il ne l’est aujourd’hui.

 

            Du 2 juillet au 3 novembre 2024, il y a, à Versailles, une exposition « Cheval en majesté – au cœur d’une civilisation » et Versailles a un partenariat avec Écouen où sera présenté, du 16 octobre 2024 au 27 janvier 2025, l’exposition « À cheval : Le portrait équestre de la France de la Renaissance ».

 

Bref, si vous ne connaissez pas Écouen, sa forêt, son château et son musée, n’attendez plus afin d’aller découvrir ces merveilleux trésors – et pensez au pique-nique en forêt (et ne laissez rien derrière vous ou nous vous lancerons quelque malédiction égyptienne bien sentie).



Exposition : Arman à la Villa Kérylos

            Si vous passez par Beaulieu-sur-Mer avant le 22 septembre 2024 et que vous appréciez l’art contemporain, la Villa Kérylos (qui fera l’objet de son propre article d’ici quelques semaines) abrite une exposition de l’artiste niçois Arman depuis le 19 mai.

            La villa est magnifique (si vous aimez aussi le classique et en particulier la Grèce) et quand vous prendrez votre billet, on vous proposera un audioguide gratuit ou un descriptif imprimé. Vous ne serez peut-être pas surpris de lire que nous avons opté pour la version papier, ce qui nous permet aujourd’hui de la partager avec vous :

 

            Voici certaines des œuvres :

Philémon et Baucis (1991)

 

Tête de David

            Lors de notre visite, nous avons entendu une visiteuse faire la remarque à une amie que les œuvres d’Arman exposées n’étaient pas dans le style habituel de cet artiste. Leur curiosité vous tentera peut-être.

Exposition : Cabu au musée Masséna

Nous avons l’impression d’avoir grandi avec les dessins de Cabu[1] autour de nous (c’est ce qui arrive quand on a grandi avec RécréA2 !).

Nous nous souvenons de l’horrible moment où la terrible nouvelle nous parvint (nous habitons tout près du lieu de la tragédie).

 

En visitant l’exposition « Vive le sport ! » au musée Masséna à Nice, nous avons regretté qu’il ne soit plus parmi nous afin de se moquer de l’organisation des jeux olympiques 2024 à Paris. Qu’aurait-il pensé des barrières qui encagent les piétons et des QR codes obligatoires pour traverser des ponts, marcher dans la rue, aller au travail ou tout simplement pour rentrer chez soi ? Son coup de patte et sa lucidité nous manquent cruellement.

 
 
 

Jusqu’au 22 septembre 2024, si vous passez par Nice, vous pouvez aller admirer certains de ses dessins ayant le sport pour sujet (et en profiter pour visiter le magnifique musée Masséna – certaines heures de visite relèvent du bain de foule, mais certains créneaux sont particulièrement calmes).

Si vous souhaitez en savoir plus sur Cabu, vous pouvez visiter son site officiel.

Pour l’Histoire, nous vous recommandons de prendre le temps de regarder le documentaire sur le n° 712 de Charlie Hebdo dont Cabu dessina la une (cliquez sur l’image afin d’avoir accès à la vidéo sur Vimeo). Les réalisateurs ont bien raison de dire, qu’après l’attentat, leurs images se transformèrent en document historique.


[1] : Jean Cabut, Châlons-sur-Marne (nommée à présent Châlons-en-Champagne, où il repose), 13 janvier 1938 – Paris, 7 janvier 2015.

 

 

Hue, dada !

            Quand on saute joyeusement la rubrique des sports dans les journaux (sauf la rubrique « sumo » de The Japan Times), on ne regarde pas forcément où sont prévues les épreuves diverses et variées des Jeux Olympiques 2024 - et comme nous en sommes encore à ronchonner parce que nous allons devoir traîner nos bagages dans le métro parce que nos bus habituels ne sont pas autorisés à traverser la Seine, nous n'avions pas regardé la liste des épreuves en banlieue.

            Apparemment, les épreuves équestres qui vont avoir lieu à Versailles seront dans les jardins du château. D’après le site officiel des jeux, le site de compétition devrait ressembler à ça :

 



 

            Du coup, lors de notre visite au château de Versailles, l’installation de l’aire olympique avait commencé (il nous faudra donc aller refaire quelques photos après le démontage des tribunes) :

 



 

            Il y a de nombreux chemins qui mènent à Versailles et vous trouverez les informations pratiques sur cette page https://www.chateauversailles.fr/preparer-ma-visite/informations-pratiques

 

            En raison des restrictions olympiques dans les jardins, il serait peut-être une bonne idée de planifier une partie de vos visites après le 15 septembre 2024 ; en revanche, nous vous conseillons de profiter, si vous le pouvez, des jardins musicaux et grandes eaux musicales. Si nous vous avons parlé de visites au pluriel, c’est parce qu’il nous semble impossible de tout voir en une journée – à moins d’arriver à l’ouverture et d’être marathonien, mais il serait vraiment dommage de ne pas profiter du château, des jardins, du parc et du domaine de Trianon (sans oublier qu’il y a bien d’autres choses à voir en ville).

            Soyez préparés pour des bains de foules dans la plupart des salles  :

 



 

            D'ailleurs la galerie des glaces ressemble aux couloirs de la station Châtelet aux heures de pointe... Soyez préparés psychologiquement. Mais il arrive quand même que certaines zones soient plus relativement plus calmes :

 




            Parfois, aussi, il suffit de bien viser dans certaines salles :

 



 

            N’oubliez pas d’admirer les murs :

 

 

            Les cheminées :

 

 

            Les plafonds :

 

 

            Ensuite, vous avez les jardins :

 


 


            Il y a tant à voir que vous comprendrez pourquoi nous vous disons qu'une unique visite est insuffisante pour tout voir.